Le gouvernement kirghize redoute l’émergence d’un califat d’Asie centrale

Le ministère de l’Intérieur du Kirghizistan a mis en garde contre diverses organisations islamistes qui renforcent leurs positions dans le sud de l’Afghanistan et le risque de résurgence de la menace extrémiste et terroriste en Asie centrale. Selon les informations en possession de Biškek, diverses organisations armées et illégales se regrouperait pour lancer de nouvelles attaques dans plusieurs pays de la région et conquérir de nouveaux avant-postes pour leur expansion.
Selon Manas Amanbaev, le chef du service kirghize de lutte contre l’extrémisme et l’immigration illégale, les talibans et l’État islamique (anciennement Isis) « Khorasan » seraient dans une phase de grand activisme pour faire revivre l’idée d’un califat islamique. Il affirme qu’au Kirghizstan, « pas moins de 20 groupes internationaux illégaux et une secte islamique radicale, fortement soutenus par les Talibans et contestés par leurs adversaires de Khorasan, et leurs activités peuvent représenter de graves dangers pour notre État ».
Le chef kirghize cite à titre indicatif les événements récents en Ouzbékistan et au Tadjikistan, des soulèvements indépendantistes qui peuvent également être interprétés comme des régurgitations du radicalisme islamique et qui « agissent contre les principes séculaires des États d’Asie centrale et leurs valeurs constitutionnelles » a-t-il indiqué.

La crainte d’une nouvelle nébuleuse islamiste

Aucun chiffre précis ni aucune information ne sont donnés sur les membres de ces organisations terroristes, mais le bruit court qu’elles augmentent le nombre de leurs adeptes. Les services de sécurité nationaux d’Ouzbékistan ont déploré les récents attentats perpétrés dans la ville de Termez, avec des charges explosives probablement tirées depuis l’Afghanistan. En réponse, les représentants du gouvernement à Kaboul ont assuré que les auteurs de ces tentatives d’attentats seraient arrêtés.
En avril, des attaques armées avaient déjà été signalées dans la région de Surkhardarinsk, avec 10 roquettes tirées du côté afghan, mais Tachkent n’a jamais confirmé cette information diffusée sur les réseaux sociaux. La radio Golos Ameriki avait également cité l’incident et rapporté que l’État islamique de Khorasan intensifie ses activités depuis le retour des talibans à Kaboul, notamment pour marquer son autonomie dans la région.
Les 26 et 27 juillet 2022, plus de 100 délégations de près de 30 pays ont participé à la conférence internationale de Tachkent ayant pour thème « Afghanistan : Sécurité et développement économique ». La réunion s’est terminée sans surprise. Les différentes délégations comme les Talibans ont réitéré leurs demandes habituelles. Les premiers demandent le respect des droits des femmes, un gouvernement inclusif et la promesse que le pays ne sera pas utilisé pour accueillir des organisations terroristes comme Al-Qaïda ; les seconds veulent la reconnaissance internationale et le déblocage des fonds du gouvernement afghan détenus dans des banques étrangères pour soulager les souffrances du peuple afghan.
L’ancien vice-président du service de sécurité kirghize, Artur Medetbekov, a commenté ces événements en soulignant que les talibans exportent en fait de plus en plus l’extrémisme et le terrorisme dans la région : « Aujourd’hui, les possibilités de communication sont plus nombreuses, grâce aux nouvelles technologies, qui peuvent agir anonymement en faveur des plans de restauration d’un État islamique en Asie centrale, semblable à l’Afghanistan. Si je ne me trompe pas, nous prenons un grand risque, et il sera essentiel de coordonner tous les États de la région pour lutter contre cette insidiosité ».

Pas de tradition extrémiste islamique au Kirghizstan

Le ministère kirghize de l’intérieur prend des mesures énergiques contre l’extrémisme terroriste, et plusieurs membres d’organisations soupçonnées d’avoir organisé divers attentats ces derniers temps ont été arrêtés. Deux personnes de nationalité étrangère ont été arrêtées alors qu’elles se préparaient à agir lors des célébrations musulmanes de ces jours-ci, et il a été signalé qu’il s’agissait de terroristes venus de Syrie, munis de faux passeports. Plusieurs citoyens kirghizes ont également été arrêtés pour suspicion de terrorisme, mais aucun détail précis n’a été donné. Il n’y a pas de tradition historique d’extrémisme islamique au Kirghizstan, mais la situation semble néanmoins assez instable, et le Žogorku Keneš, le Parlement de Biškek, prévoit d’adopter de nouvelles réglementations « contre les activités et idéologies extrémistes, les organisations terroristes internationales, la protection des droits des personnes, la liberté et les principes constitutionnels ».