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Interdiction de l’abaya à l’école : une enquête Ifop confirme un soutien massif des français

À l’occasion de la première journée d’application de l’interdiction des abayas, l’Ifop et Charlie Hebdo ont publié une enquête d’envergure révélant que l’interdiction du port des abayas et des qamis à l’école fait chez les français l’objet d’un consensus encore plus fort (81 %) que la loi de 2004 interdisant les signes religieux (73 %). Détails sur cette enquête et les éclaircissements fournis par son auteur, François Kraus, à la LICRA pour son magazine DVV.

Interdiction des abayas et des qamis : un quasi-consensus dans l’opinion publique

L’interdiction des abayas et des qamis annoncée par le ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, est une décision massivement soutenue par l’opinion publique française, électeurs mélanchonistes et écologistes inclus. Les résultats de cette étude menée auprès d’un échantillon deux fois plus large qu’à l’accoutumée (2200 personnes) sont éloquents : l’interdiction des abayas et des qamis annoncée par Gabriel Attal fait l’objet d’un quasi-consensus avec 81% des Français qui approuvent cette interdiction, soit, comme le souligne François Kraus, un soutien encore plus élevé que ce que l’on avait pu observer il y a une vingtaine d’années à propos de la loi interdisant les signes religieux (73% en avril 2004).
À l’exception des musulmans qui pour les deux tiers d’entre eux (66%) s’opposent à cette mesure, l’enquête révèle que l’interdiction est soutenue majoritairement dans toutes les catégories de la population, y compris les jeunes (63%) et les habitants des banlieues populaires (71%) qu’on aurait pu croire plus partagés sur le sujet.
Confirmant d’autres études menées sur des plus petits échantillons (ex : 82% d’après un sondage CSA/Cnews du 29 août, 71% selon une enquête Elabe/BFMTV des 29 et 30 août), cette enquête Ifop/Charlie Hebdo, souligne son auteur, a donc « le mérite de montrer que l’opinion des Français est en phase avec la position du corps enseignant sur le sujet » (une enquête Ifop/Ecran de Veille menée l’an dernier auprès de 1000 enseignants du primaire et du secondaire ayant montré que 82% d’entre eux étaient opposés aux abayas et aux qamis dans les établissements publics).

Les leaders Insoumis et EELV déconnectés de la majorité de leurs électeurs sur ce sujet

Les critiques portées à l’encontre de la décision du ministre par plusieurs personnalités de la gauche radicale comme Thomas Portes, Mathilde Panot, Manuel Bompard, Sandrine Rousseau…, apparaissent au travers de cette enquête, comme loin d’être partagées par leurs électeurs. Ainsi, 79% des sympathisants EELV interrogés approuvent l’interdiction des abayas et des qamis, soit une proportion semblable à ce que l’on observe chez les sympathisants socialistes et communistes (73% à 81%). Si un tel score n’est pas en soit surprenant chez des électeurs écologistes beaucoup plus sensibles que la moyenne aux différentes formes d’injonctions vestimentaires et corporelles qui pèsent sur les femmes, note François Kraus, il amène néanmoins, selon lui, « à relativiser le poids des critiques de certaines députées EELV, notamment celles de Sandrine Rousseau et de Sandra Regol qui ont dénoncé dans cette décision une forme de contrôle du corps des femmes ».
Mais pour l’auteur, directeur du pôle Politique / Actualités à l’Ifop, c’est surtout le désaveu de la position de La France Insoumise par une grande partie de ses électeurs qui est le plus important à souligner dans la mesure où cette organisation est de loin la plus offensive en la matière. François Kraus rappelle en effet que Manuel Bompard a été le premier parlementaire à annoncer qu’il proposerait à son groupe parlementaire d’engager une action auprès du Conseil d’État pour contrer l’interdiction de l’abaya à l’école. Or, l’enquête montre que 58 % des sympathisants LFI soutiennent cette interdiction. Un chiffre qui augmente dans les catégories des sympathisants âgés (74% des 50 ans et plus), des ruraux (70%) ou encore des « athées convaincus » (60%). Quant à Jean-Luc Mélenchon, « il semble plus en phase avec les sympathisants insoumis les plus jeunes, les plus diplômés et les plus religieux » fait remarquer le directeur de l’Ifop.

Une unanimité autour du Droit des femmes

L’ interdiction prononcée par Gabriel Attal apparaît soutenue aussi bien par l’ensemble des personnes se disant « féministes » que par les militant(es) engagé(e)s dans des associations pour la défense des Droits des femmes. Ainsi, commente François Kraus, les positions prises par des personnalités féministes comme Sandrine Rousseau ou Clémentine Autain « ne semblent pas non plus très représentatives de celles des féministes françaises en général et de celles des militant(es) engagé(e)s dans les associations féministes en particulier ». En effet, souligne l’auteur de l’enquête, si certaines voix affirment que la décision du Ministre irait à l’encontre des droits des femmes, les personnes se disant féministes soutiennent en réalité très fortement cette interdiction (81%) même si, il faut le relever, les femmes féministes (78%) y sont un peu moins favorables que les hommes féministes (86%). De même, ajoute-t-il, alors qu’on entend beaucoup sur le sujet la voix critique de féministes « intersectionnalistes » et « anti-racistes », nos résultats montrent que les militantes engagé(e)s dans des associations féministes sont en réalité majoritairement favorables à cette interdiction : 63% des personnes militant dans « une association ou un collectif défendant les droits des femmes » sont favorables à l’interdiction. Ce taux plus faible que la moyenne (81 %) est le signe, selon François Kraus, de l’impact des discours dénonçant les risques de stigmatisation qu’une telle interdiction fait encourir aux élèves concernées.
Cela n’empêche pas que globalement, constate l’enquête, les personnes défendant la cause des femmes voient dans l’abaya un vêtement qui contribue à invisibiliser les filles auprès de leurs camarades et de leurs enseignants, et ceci d’autant plus que cet effacement n’est pas qu’esthétique. Pour étayer son analyse, François Kraus cite le témoignage d’un enseignant de l’Ain qui rapporte que dans son lycée, « le port de l’abaya s’est accompagné d’une perte de ’joie de vivre’, d’un ’effacement’ en cours (moins de participation), d’un isolement vis-à-vis de leurs camarades vêtu(e)s ’normalement’ et d’un repli communautaire, (les filles s’étant) mises à fréquenter seulement les filles en abaya » [1].
Ainsi, conclut, le directeur du pôle Politique / Actualités à l’Ifop « Défendre le port d’une tenue qui amènerait pour certains à une forme d’« apartheid » - au sens littéral de développement séparé – tant sur le plan de la religion (entre musulmans et non-musulmans) que du genre (entre filles et garçons) au sein des établissements semble donc susciter une gêne au sein de progressistes, généralement très sensibles aux enjeux de mixité et de féminisme ».

Le caractère religieux des abayas : un fait indéniable

Si la dimension religieuse de cette longue robe fait l’objet d’un débat public, l’étude de l’Ifop montre que ce n’est pas vraiment le cas pour les Français qui pour 70% d’entre eux partagent le point de vue du Ministre sur le caractère indéniablement religieux des abayas et des qamis, notamment au regard de la manière dont ce vêtement est aujourd’hui vendu aux jeunes sur les sites de ventes en ligne.
En effet, comme le souligne François Kraus dans son analyse, si le vice-président du CFCM, Abdallah Zekri, a jugé que « l’abaya » était « une forme de mode » qui « n’a rien à voir (avec la religion) », cet avis est en profonde contradiction avec la manière dont ces tenues sont, aujourd’hui, présentées en France par ceux qui les vendent sur Internet, que ce soit sur des plateformes généralistes (ex : Amazon, Alibaba…) ou sur la myriade de sites marchands communautaires spécialisés dans la « modest fashion ».

Afin de mettre en perspective le point de vue des Français(es) sur le caractère religieux de ces tenues avec la manière dont l’abaya et le qamis sont présenté(e)s réellement à leurs acheteur/ses en France, l’Ifop a en effet analysé l’intégralité des annonces de ventes d’abaya/de qamis proposées par les pages du moteur de Google en langue française en suivant les mots clés « Abaya », « Qamis » ou « Abaya ventes » / « Qamis pas cher » entre le 30 août et le 1er septembre 2023. De cette recherche reposant sur un échantillon de plus d’une centaine d’annonces en ligne (144), il ressort que :
- 79% des abaya/qamis vendu(e)s en France sur Internet sont soit présenté(e)s avec un caractère religieux explicite (53%), soit vendues sur des sites ne vendant que des produits au caractère religieux explicite (26%) ; Par caractère religieux explicite, l’Ifop entend des annonces où l’abaya / le « qamis » sont associé(e)s par exemple à des termes comme « religieux », « islamique » « musulman(e) »...
- 21% des abaya/qamis vendu(e)s en France sur Internet ne sont pas présentées avec un caractère religieux explicite : l’Ifop ayant considéré que les notions de « modestie » ou de « pudeur » présentées par les vendeurs en ligne n’étant pas en elles-mêmes un caractère religieux explicite. Toutefois, si on considère que les notions de « modestie » ou de « pudeur » sont le fruit d’une injonction d’origine religieuse, la proportion d’abaya/qamis vendus sans références religieuses tombe à 14%…
Pour ceux qui douteraient encore de la manière suivant laquelle sont « marketées » ces tenues sur le marché français, l’étude invite le lecteur à se rendre sur un site Alibaba où 1,2 millions d’abayas sont vendues dans la catégorie « vêtements islamiques ».

Notice  : Étude réalisée par l’Ifop pour Charlie Hebdo. Echantillon : ’enquête a été menée auprès d’un échantillon de 2 145 personnes, représentatif de la population âgée de 18 ans et plus vivant en France métropolitaine. Méthodologie : la représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, profession de la personne interrogée) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Mode de recueil : Les interviews ont été réalisées par questionnaire auto-administré en ligne du 30 au 31 août 202

[1Note de l’étude : « Interview de Éric, enseignant, lycée (Ain) In Marrius Matty, Interdiction de l’abaya, entre soulagement et opération de com, profs, CPE et chefs d’établissement réagissent, Marianne, 31 août 2023 »

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