«On ne fait pas d’élection avec des prières »Proverbe québécois

 

Pèlerinage

Via Francigena : « Tous les chemins mènent à Rome »

Avec celui de Jérusalem et de Saint-Jacques de Compostelle, la Via Francigena fut l’un des trois grands pèlerinages chrétiens du Moyen Age. D’abord empruntée par les pèlerins qui souhaitaient se rendre au tombeau de saint Pierre dans la basilique de la cité Vaticane, la Via Francigena devint ensuite un faisceau d’itinéraires utilisés par les Francs qui voyageaient et acheminaient des marchandises du nord de l’Europe vers les pays de la Méditerranée. L’historien Jacques Le Goff décrit cette voie comme « le pont qui relie l’Europe anglo-saxonne et latine ».
Labellisée grand itinéraire culturel du conseil de l’Europe en 2004, aujourd’hui la Via Francegina renait. Tout comme sur le chemin de Compostelle, certains se lancent dans ces trois mois de marche pour assouvir une quête spirituelle, d’autres par amour du sport ou tout simplement par envie de découvrir les paysages et le patrimoine qu’elle traverse.

Naissance et développement du pèlerinage

La voie fut appelée Iter Francorum à partir de 725, et figure déjà dans l’Itinerarium de saint Willibald (Evêque d’Eischstätt, ✝ 787), premier pèlerin anglais connu à faire le récit de son voyage jusqu’en Terre Sainte. Mais ce n’est qu’un siècle plus tard qu’un parchemin toscan, l’Actum clusio, datant de 876 et provenant de l’abbaye Saint-Sauveur du Mont Amiata, fait pour la première fois référence au terme Via Francigena.

À ce jour, le plus ancien texte qui décrive avec précision le trajet d’un pèlerin sur la « voie des Francs » est celui du clerc anglais Sigéric. En 990, à peine élu archevêque de Canterbury, Sigéric se rendit à Rome pour recevoir des mains du pape Jean XV, le pallium, une étole en laine ornée d’une croix. Le port de cet ornement sacerdotal, réservé à certains primats ou archevêques, symbolise la communion avec le successeur de saint Pierre. Le récit du voyage retour de Sigéric atteste de l’existence de ce chemin avant même les premières descriptions des routes vers Compostelle.

De nombreux voyageurs empruntèrent alors la Via Francigena, appelée aussi « Via Romea ». En 1154, l’abbé islandais Nikulas de Munkathvera suivit le trajet emprunté par Sigéric à partir du col du Grand-Saint-Bernard.
L’infrastructure de cet itinéraire, également utilisé pour les déplacements militaires et les échanges commerciaux, connut ainsi un fort développement. Comme sur le Camino francés en Espagne, des villes et des bourgs se déployèrent. La ville de Sienne, par exemple, doit sa croissance à la Via Francigena, si bien que l’historien Sestan la nomme « ville née de la route ».
De même, les lieux où le pèlerin était accueilli se multiplièrent. En Italie, la route fut jalonnée de « mansiones », ancêtres des gîtes d’étapes. Les ordres monastiques (comme les chevaliers d’Altopascio) et chevaleresques (chevaliers du Temple, chevaliers de l’Hôpital de Saint-Jean-de-Jérusalem) se mirent par ailleurs au service du pèlerin en lui prodiguant l’hospitalité.

Pèlerins en route vers Rome sur la Via Francigena (haut-relief sculpté sur la cathédrale de Fidenza à la fin du XIIe siècle).

La fréquentation de cette route s’accrut encore à partir de 1300. Cette année-là, le premier jubilé romain fut en effet proclamé par le pape Boniface VIII. Désormais, tous les pèlerins qui, durant une année jubilaire, visiteraient les basiliques romaines consacrées à saint Pierre et à saint Paul bénéficieraient d’une indulgence plénière, à condition de recevoir les sacrements de la communion et de la confession. A partir du XIVe siècle, cependant, plusieurs événements ralentissent la progression du pèlerinage. Pour l’année jubilaire de 1350, le roi Philippe de Valois interdit à ses sujets de se rendre à Rome. En 1399, Charles VI réitéra cette interdiction. Les périodes de guerres et d’épidémies, ainsi que les conséquences de la Réforme, diminuent également le flot des « romieux ».
En 1550, ils ne sont que 50 000 à venir des pays étrangers pour recevoir la bénédiction pascale. Mais vingt-cinq ans plus tard, le pèlerinage connait un nouvel essor, dû en partie aux déclarations du Concile de Trente. On recense plus de 400 000 pèlerins en 1575 et 700 000 en 1650. À partir de la fin du XVIIe siècle, les critiques acerbes contre la pratique du pèlerinage n’épargnèrent pas la pérégrination romaine. Dès lors, ce seront surtout des pèlerins italiens qui viendront se prosterner devant les reliques de saint Pierre.

79 étapes et 1 700 km depuis la ville Éternelle jusqu’à Canterbury.

Sigéric qui tient un journal décrit dans ce manuscrit les 79 étapes ( 48 en Italie, 7 en Suisse, et 24 en France) de son voyage de retour, de Rome à Canterbury.

La ville de Sienne

Par exemple, il relate son arrivée en Toscane près de Radicofani, le passage à Sienne, la traversée de l’Arno à Fucecchio, puis Lucques, Pontremoli et Montelungo. Après le col de la Cisa, dans le territoire de Parme, Sigéric cite « Sancte Moderanne » (Berceto), « Philemangenur » (Fornovo), « Metane » (Medesano ou Costa Mezzana) et « Sancte Domnine » (Fidenza).

Puis lorsqu’il quitte l’Italie par le col du Grand-Saint-Bernard et traverse la Suisse par Bourg-Saint-Pierre, il dépeint Saint-Maurice, Lausanne et Orbe.

Les Fourgs, dernier village traversé en France avant la Suisse

Dans les étapes françaises, acheminant Sigéric jusqu’à Calais, on reconnaît notamment Pontarlier, Besançon, Bar-sur-Aube, Châlons-en-Champagne, Reims, Arras. Puis l’archevêque franchit la Manche pour rejoindre Canterbury, mais cette étape n’est pas mentionnée dans son manuscrit.

La Porte romaine Mars à Reims

Ainsi nait l’itinéraire de la Via Francigena. Celui proposé aujourd’hui suit les préconisations de l’AIVF (Association Internationale Via Francigena), créée pour faire revivre cette voie de pèlerinage vers le tombeau de saint Pierre. L’association publie des guides, effectue des études et soutient la mise en place d’un balisage et de structures d’accueil sur l’ensemble du parcours. À noter que ce chemin, qui se fait traditionnellement à pied, est également un itinéraire cyclable EuroVelo (EV 5 - Via Romea Francigena), mais sur un parcours différent.

Peu balisée et faiblement fréquentée

Faiblement fréquentée, la Via Francigena garde l’authenticité des chemins au temps de leur renouveau. Mais pour ceux qui ont parcouru le chemin de Compostelle, parcourir la Via Francigena sera une expérience plus difficile, plus « sauvage ». En France, notamment, on traverse de petits villages et l’on peut marcher plusieurs jours sans rencontrer d’autres pèlerins ou une épicerie ouverte. Les offices du tourisme s’intéressent encore peu à la voie des Francs et les églises des villages traversés sont souvent fermées et n’indiquent pas qu’elles se situent sur la voie.

D’ailleurs, le balisage de la Via Francigena n’est pas encore continu. Le kilomètre zéro est indiqué devant la cathédrale de Canterbury, et le court trajet britannique est balisé. Mais en France, seuls les départements du Pas-de-Calais, de la Marne, de la Haute-Saône et du Doubs sont entièrement balisés. En Suisse, en revanche, on suit des sentiers de randonnée sur la quasi totalité de l’itinéraire. En Italie, un parcours officiel et des variantes sont balisés. Pour se diriger, il faut repérer son balisage qui se matérialise par un petit pèlerin jaune, portant un sac à dos. Mais on trouve parfois uniquement les lettres « VF », « F », ou « SF » (Sentiero dei Franchi) dans le val de Suse et « CAI » (Club alpin italien) dans les Apennins.

Saison et météo et équipement

Les périodes les plus agréables pour effectuer la Via Francigena sont le printemps et le début de l’automne. En été, la traversée de l’Italie est en effet exposée aux grandes chaleurs.

Le Col du Saint-Bernard

Le relief est montagneux lors du franchissement du Jura puis des Alpes, en Suisse, notamment pour l’étape du Grand-Saint-Bernard (le col se situe à 2473 m d’altitude) qui n’est ouvert que de mi-juin à fin octobre ou mi-novembre.

Si la météo est mauvaise pour cette étape, il est recommandé de prendre le bus ou le petit train du Grand-Saint-Bernard. En cas de besoin, on peut également prendre contact avec les moines qui aident les pèlerins à passer le col.

En Italie, le relief est également montagneux, surtout dans les Apennins. Il est donc préférable de prévoir des chaussures montantes et un bâton de marche. Il faut aussi se prémunir à la fois contre la pluie et le soleil.

Un budget de 30 à 50 € par jour

Sur la Via Francigena, il existe peu de gîtes spécifiques et de lieux de ravitaillement pour les pèlerins, sauf en Italie. Il faut donc prévoir une organisation et un budget en conséquence car le réseau des structures d’accueil le long de la Via Francigena au moins en France est encore à construire. Côté hébergement, on trouve des chambres aux prix modestes et si l’on prévoit un pique-nique pour midi et un repas chaud le soir (table d’hôte ou restaurant), on peut compter un budget moyen de 30 à 50 euros par jour. Pour mémoire, en 2014, le budget moyen des 237 886 pèlerins du chemin de Compostelle était de 36 € par jour.

Le futur pèlerin ne peut donc pas, comme sur le Camino Frances vers Compostelle, se fier à la Providence, à la proximité des hébergements et des points de ravitaillement. Mais les hospitaliers volontaires, souvent d’anciens pèlerins, font tout pour aider tout le monde. Leur rareté a au moins une vertu : inciter ceux qu’ils accueillent à se souvenir que : « Le touriste exige, le pèlerin remercie ».

Pour en savoir plus :
- Fédération Française Via Francigena La Fédération Via Francigena France et ses associations membres, vous aideront dans votre préparation du chemin, pendant votre pérégrination et vous fourniront votre carnet de pèlerin ou credenziali.
- Spiritualitas in Francigenam regroupe les amateurs de pèlerinage et les différents intervenants de la voie avant, pendant et après le pèlerinage. Bientôt un blog vous donnera de multiples informations.
- Les amis de la via Francigena Ce blog est animé par Charles Myber et permet de suivre l’actualité de la via Francigena en France
- Le site de lAssociation Européenne Via Francigena vous y trouverez de nombreuses informations sur la partie italienne et peu à peu des informations sur les autres pays traversés.

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