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- Publié le 1er avril 2022
Faire ou refaire société

La guerre en Ukraine qui vient recouvrir du tonnerre des canons la campagne présidentielle française, l’invasion du « grenier à blé » européen par la Russie qui martyrise la population ukrainienne et menace la subsistance de toutes celles vivant sur notre planète en posant avec encore plus d’acuité, mais aussi d’égoïsme et d’égocentrisme, le problème du pouvoir d’achat des Français, nous impose ses échéances et la question de son « Après », du « vers quelle société (monde) allons-nous ? », de « quelle société (monde) voulons-nous ? ». Le problème de son« Après » est aussi difficile à résoudre que celui de son « Avant », c’est celui d’un sempiternel défi toujours relevé mais jamais vraiment gagné : « Comment faire société ? ».
Ce problème a été récemment interrogé par la pandémie de la Covid-19 qui tarde elle aussi à cesser les hostilités envers les humains. Après deux ans de présence du coronavirus, dans un monde où la guerre frappe aux portes du sanctuaire européen, à nouveau l’incertitude gagne. Tout semble venir contrecarrer l’embellie attendue, ralentir l’avenir. Et comme le fut la pandémie, le conflit en Ukraine (sans oublier tous les autres) est le révélateur des problèmes endémiques de l’humanité : respect des droits fondamentaux et des droits humains, extrémisme, accès à l’éducation, égalité (femmes-hommes), pauvreté, changement climatique,...
Alors comment, au moment où cela est plus que jamais nécessaire, (re)construire une société du vivre et du faire-ensemble sans tomber dans l’imprécation politique ou théologico-politique comme c’est le cas dans de plus en plus de pays, y compris dans les plus insoupçonnables de pareils travers comme la Russie où désormais l’obscurantisme prévaut, où l’autocratie alimentée du ferment du dogme religieux, « le monde russe », plonge ce pays et la planète entière dans une nouvelle crise, politique, économique, sociale, axiologique, spirituelle et religieuse.
Faire prévaloir l’intérêt général mondial dans un monde qui change. Comment faire ? Faire société, re-faire société alors que les inégalités augmentent et côtoient les libertés à géométrie variable, que les particularismes s’affirment tout comme les convictions personnelles érigées en autant de vérités, que la pensée critique peine à se faire entendre, quand elle n’est pas dévoyée, que l’urgence prime sur le temps long. Comment l’imaginer, le concevoir, le défendre et le réaliser ?
À quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle française, une plongée dans les discours et les programmes des candidats, montre que le problème peine à être identifié de manière concise, comme si sa formulation était insoluble.
Pourtant, et tant pis si je me répète, une réponse à ces questions nous a été proposée à la fin du XIXe siècle par Léon Bourgeois. Son credo était « L’individu isolé n’existe pas ». Il en a fait une doctrine politique, le solidarisme qu’il a exposé en 1896 dans son ouvrage Solidarité. Le solidarisme au niveau de l’individu est fondé sur la « responsabilité mutuelle qui s’établit entre deux ou plusieurs personnes » ou encore un « lien fraternel qui oblige tous les êtres humains les uns envers les autres, nous faisant un devoir d’assister ceux de nos semblables qui sont dans l’infortune ».
Sous la IIIe république, du point de vue de l’État, le solidarisme de Léon Bourgeois se veut une réponse philosophique et sociopolitique moderne du Parti Radical face au libéralisme et à la poussée du socialisme. Basé sur la mutualité considérée comme la « règle suprême de la vie commune », le solidarisme entend apporter à la République un fondement théorique capable de s’imposer durablement et de légitimer l’intervention de l’État, comme expression de la volonté générale mais dans le respect de la liberté individuelle. C’est au nom de la solidarité que sont défendus le principe de l’impôt sur les successions, sur les revenus et du système de retraite pour les travailleurs.
Cette solidarité collective qui s’oppose à tout effacement de l’individu au profit de la collectivité est ainsi entendue comme une forme de la justice comme équité, ce qui la distingue par exemple de la charité chrétienne, car la solidarité a notamment sur la charité cet avantage d’autoriser les sanctions. Comme « Devoir » et « sanction » étaient déjà intimement liés à la notion de justice et de respect du droit dans l’esprit de Léon Bourgeois : le devoir de bienfaisance pouvait dès lors justifier l’intervention de la force publique.
Ainsi le solidarisme de Léon Bourgeois trouvait des applications aussi bien dans la résolution des maux sociaux que dans les relations internationales. Il devait se produire un passage de l’état de concurrence (le conflit) à l’état de solidarité (la paix, c’est à dire la concorde). Et c’est à cette cause que Léon Bourgeois s’est consacré entre 1899 et 1925. Il a mis quinze années pour mûrir la théorie de la solidarité des peuples et en définir l’expression la plus parfaite : la Société des Nations dont il est le fondateur.
Faire ou refaire société, ce n’est donc pas envisager uniquement « l’Après » mais aussi voir ce qu’il y avait « Avant ». Cette attitude qui repose sur le principe de la génération, un principe propre aux êtres vivants, pour devenir social, politique et économique doit composer la diversité unifiée, reposer sur l’universalité. Re-faire société ce n’est pas exclure ni catégoriser. Cela parait tellement évident. Et pourtant, aucun des candidats à la présidence française, porteur d’un projet de société pour ces 5 prochaines années n’en a fait un slogan de campagne, le titre de son programme. Les mondes d’Après qui nous sont proposés ne risquent-ils pas à nouveau de décevoir celui d’Avant. Il ne nous resterait plus alors qu’à en faire un nous-même. C’est toute la complexité du monde actuel où paradoxalement seuls la guerre et le courage des combattants, cassent le moule, rétablissent la nation, la solidarité, et font émerger (en Ukraine) l’espoir au présent.

Solidaires !
L’invasion de l’Ukraine par la Russie ne doit laisser personne indifférent !!! Outre les condamnations, il faut agir pour redonner et garantir son intégrité territoriale à l’Ukraine afin d’empêcher tout autre pays de suivre l’exemple terrible de cette invasion par la force.
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