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Les comportements rigoristes sur le lieu de travail progressent selon le Baromètre du Fait Religieux en Entreprise 2020-2021

L’Institut Montaigne publie ce jour l’édition 2020-2021 du Baromètre du Fait religieux en entreprise. Cette étude de l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise dirigé par Lionel Honoré révèle que 66,5 % des répondants rencontrent des faits religieux dans leur environnement professionnel et pointe la progression des comportements rigoristes sur le lieu de travail.

Dans le contexte douloureux et incessant des attentats islamistes et dans la perspective de l’adoption du projet de loi, renommé par le Sénat « loi confortant le respect des principes de la république et contre le séparatisme » cette édition du Baromètre du Fait religieux en entreprise vient à point nommé nous éclairer sur le phénomène du fait religieux en entreprise que les chefs d’entreprises n’aiment en général guère évoquer ni commenter. Ce Baromètre a donc le mérite de l’objectiver afin de permettre aux acteurs concernés de mieux le comprendre. Son auteur, Lionel Honoré [1], a sondé plus de 1 120 managers pour nous livrer cet état des lieux.

66,5 % répondants rencontrent des faits religieux au travail

Comme les années précédentes, l’édition 2020-2021 du Baromètre du Fait religieux en entreprise révèle que deux tiers des répondants (66,5 %) indiquent être confrontés au moins occasionnellement au fait religieux sur leur lieu de travail et que dans 54 % des cas cela donne lieu à une intervention managériale, L’étude signale aussi que 21 % des interrogés ont repérés occasionnellement ou régulièrement des discriminations liées à la religion. Ainsi les comportements négatifs à l’égard des femmes comme ne pas vouloir serrer la main d’une collègue ou refuser de travailler sous ses ordres, représentent le troisième fait le plus fréquent (13 %). On peut sans doute relier ce pourcentage à celui des comportements rigoristes qui progressent : 12 % en 2021 contre moins de 8 % en 2019. En outre, le Baromètre note que la part des conflits et blocages afférents a augmenté par rapport à 2019 :16 % des cas en 2020-2021, contre 12 % en 2019.

Un fait de plus en plus banalisé

Il n’en reste pas moins, affirme l’auteur du Baromètre, que le fait religieux en entreprise est de plus en plus accepté. Cela est-il dû à une tendance stable (mais haute) du phénomène durant ces 4 dernières années ? L’étude ne le dit pas. Ce qu’elle rapporte des entretiens qualitatifs menés au sein d’entreprises concernées, c’est que les managers sont plus habitués à le gérer et que les salariés en parlent mieux. Ainsi, 76,5 % des demandes d’expression religieuses sont perçues comme raisonnables quand 70 % des comportements des salariés pratiquants, peu perturbateurs car peu revendicatifs, ne gênent pas la bonne réalisation du travail. Contrairement aux idées reçues, le Baromètre indique donc que dans la grande majorité des cas, le fait religieux en entreprise n’est pas une cause de tensions sur le lieu de travail. Seule une minorité de cas, 19,5 % des situations, sont problématiques.

Mais quand bien même est-il banalisé, le fait religieux majoritaire reste… le fait invisible, souligne l’étude. Beaucoup de pratiquants choisissent de ne pas montrer leur religion au travail. Ce choix, précise-t-elle, peut être librement consenti ou conduit par peur de stigmatisation.

Les faits religieux les plus fréquents en entreprise

Le fait religieux en entreprise, rappelle Lionel Honoré dans son étude, peut se présenter sous plusieurs formes, de la moins problématique à la très problématique. Il en donne quelques exemples :

  • un salarié qui demande un congé à son manager pour assister à une fête religieuse : ces demandes d’aménagements du temps de travail ou d’absence représentent 29 % des faits religieux en 2020-2021 ;
  • un autre qui subit des discriminations du fait de son appartenance à une religion, par ses collègues ou par son manager ;
  • un manager qui ne sait pas comment réagir face à un salarié priant dans son bureau ;
  • un salarié qui refuse de travailler avec ou sous les ordres d’une femme ;
  • un collègue qui fait du prosélytisme dans son bureau.

Pourquoi le fait religieux en entreprise progresse-t-il ?

Le fait religieux en entreprise n’est pas un phénomène nouveau. En 2012, date de lancement du Baromètre, rappelle son auteur, 44 % des encadrants déclaraient déjà faire face à des faits religieux en situation de travail. En 2021, 66,5 % l’observent désormais de manière occasionnelle ou régulière. Dans son analyse des résultats de l’édition 2020-2021de son Baromètre, Lionel Honoré souligne que la présence de plus en plus significative du fait religieux en entreprise « va de pair avec la progression de la place qu’occupe le travail dans la vie des personnes ». Il fait aussi observer que les entreprises attendent de plus en plus de leurs salariés une implication plus personnelle et plus engageante, rappelant aussi que la logique « venez comme vous êtes » s’est progressivement imposée, et qu’elle est prise au mot par les salariés croyants.
Il voit ainsi se dessiner, derrière cette progression, la question de la place de la religion dans la société, « une évolution sociale et sociétale qui se retrouve en entreprise ». Il pointe également le fonctionnement de notre société et le problème de l’équilibre entre les principes religieux et les principes républicains : « Comment positionner les discours religieux par rapport aux autres systèmes de régulation de vie commune ? » interroge-t-il en conclusion avant de fournir des solutions.Lire l’étude complète

Coordonnées de l’étude : L’Auteur Lionel Honoré est professeur en sciences de gestion à l’Institut d’Administration des Entreprises de Brest. Il dirige l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise qu’il a créé en 2012 à Sciences Po Rennes. Ses travaux de recherche portent sur le fonctionnement des organisations et sur les comportements au travail.
Pour cette huitième édition du Baromètre (2020-2021) du Fait religieux en entreprise, l’Institut Montaigne s’associe, pour la seconde fois, après sa septième édition (2019), à l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise (OFRE). Jusqu’en 2018, ce Baromètre était le fruit d’une collaboration entre Randstad et l’OFRE.

[1Lionel Honoré est professeur en sciences de gestion à l’Institut d’Administration des Entreprises de Brest. Il dirige l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise qu’il a créé en 2012 à Sciences Po Rennes. Ses travaux de recherche portent sur le fonctionnement des organisations et sur les comportements au travail.

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