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Pédocriminalité : L’Église catholique française prend ses responsabilités et veut indemniser toutes les victimes

A l’issue de leur assemblé plénière d’automne, les évêques de France ont annoncé la vente « de biens immobiliers ou mobiliers » pour financer le fonds d’aide aux victimes et énuméré de nombreuses décisions destinées à tourner définitivement la page de la pédocriminalité au sein de l’Église de France.

Création d’une instance d’indemnisation des victimes

Première de toutes les résolutions découlant de la déclaration du 5 novembre confirmant la reconnaissance de la responsabilité institutionnelle de l’Église dans les violences faites aux victimes et de leur dimension « systémique », les évêques de France ont transformé l’INIA créée en mars 2021 en Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (INIRR). Sa présidence est confiée à Mme Marie Derain de Vaucresson, juriste, cadre du ministère de la justice ancienne défenseure des enfants adjointe du défenseur des droits de 2011 à 2014, qui constituera « son équipe à sa guise sur le modèle de la commission Sauvé » a souligné Mg de Moulins-Beaufort, indiquant que « sa mission commence dès à présent avec les moyens financiers nécessaires ». Cette décision reprend les recommandations 27-31-32 du rapport Sauvé.

Des biens vendus pour abonder le fonds d’indemnisation

La présidente de l’INIRR aura comme première tâche de définir un cadre et des modalités à la l’indemnisation des victimes, y compris pour celles dont les faits et crimes seraient prescrits a encore précisé Mgr de Moulins Beaufort annonçant que pour financer l’indemnisation des personnes victimes, l’Église n’utilisera pas le « denier de l’Eglise » ou les « dons des fidèles ». Les évêques de France s’engageraient donc à abonder le fonds SELAM avec les fonds de sécurité des diocèses mais surtout en se dessaisissant de biens immobiliers et mobiliers de la CEF et des diocèses (Cf recommandation 33 de la Ciase). « Tous les évêques ont accepté d’essayer d’identifier dans leurs diocèses les biens dont ils pouvaient se défaire », a affirmé le président de la CEF en indiquant qu’un emprunt pourrait aussi être souscrit par l’Église pour anticiper les besoins.

Prévention et répression renforcées

Désormais la vérification des antécédents judiciaires de tout agent pastoral (laïc, personne consacrée, clerc) appelé à travailler auprès des mineurs devrait être systématique et tous les prêtres (séculiers et religieux) disposeront d’un « passeport » national établi sur le modèle du « celebret » [1] et mis à jour régulièrement avec indication de la faculté de confesser.
Par ailleurs, dans un proche avenir, l’ensemble des diocèses, ils ne sont que 17 aujourd’hui, sont appelés à signer un protocole avec le ou les parquets de leurs juridiction.
Après la remise du rapport de la Ciase, bien que la causalité entre les crimes sexuels et le célibat des prêtres ait été écartée par la commission Sauvé, beaucoup ont souhaité, en vain, que l’Église catholique abandonne le célibat des prêtres. Celle-ci en imposant désormais la participation d’au moins une femme au conseil de chaque séminaire et de maisons de formation, avec droit de vote, tente de donner le change en féminisant ses instances de formation, de délibération et de décision. On peut ainsi s’attendre à ce que les femmes soient de plus en plus nombreuses et écoutées au sein des commissions et conseils, groupes de travail et autres conférences synodales qui travailleront jusqu’en 2023 à donner suite aux travaux de cette Assemblée plénière. Neuf groupes de travail ont ainsi été créés sur les thèmes suivants :Partage de bonnes pratiques devant des cas signalés ; Confession et accompagnement spirituel ; Accompagnement des prêtres mis en cause ; Discernement vocationnel et formation des futurs prêtres ; Accompagnement du ministère des évêques ; Accompagnement du ministère des prêtres ; Manière d’associer les fidèles laïcs aux travaux de la Conférence des évêques ; Analyse des causes des violences sexuelles au sein de l’Eglise ; Moyens de vigilance et de contrôle des associations de fidèles menant la vie commune et de tout groupe s’appuyant sur un charisme particulier.

Organiser une rupture avec le passé

Les décisions annoncées montrent que les Évêques de France semblent avoir tiré toutes les conclusions du rapport Sauvé et de l’écoute des victimes et des laïcs. Le président de la CEF, Monseigneur Moulins-Beaufort, auquel a incombé la lourde tâche de mener cette démarche de vérité, a souligné lors de sa conférence de presse, la volonté de toute l’institution à mettre en oeuvre ces mesures et à tout faire pour « dégager l’Église et l’image du Christ » incompatible avec ce contexte criminel. L’Assemblée des évêques de France a d’ailleurs décidé d’ériger un tribunal pénal canonique national qui rentrera en fonction au 1er avril 2022. Elle s’en est également pour partie remise au Pape, à qui elle demande d’envoyer une équipe de visiteurs afin d’évaluer sa mission en ce qui concerne la protection des mineurs et de donner, si nécessaire, les suites qui s’imposent à l’issue de leur visite.
Enfin un travail sur tous les points doctrinaux mentionnés par le rapport de la Ciase (morale sexuelle, anthropologie, sacerdoce ministériel, instrumentalisation de la Parole de Dieu, distinction entre pouvoir d’ordre et pouvoir de gouvernement ...), sera également mené en s’appuyant sur les compétences des universités catholiques. Tout cela suffira-t-il à l’Église pour opérer la rupture nécessaire avec les pratiques du passé et conserver ainsi son héritage ? Un dilemme crucial qui a défaut de rester sans réponse pose à court terme la question de l’étiolement du lien de l’Église avec les fidèles et la société, de la promesse du salut et plus globalement, du maintien en son sein du saint et du sacré.

Illustration : Mgr de Moulins-Beaufort montre la photo de « l’enfant qui pleure ». Cette photographie désormais fixée au mur du bâtiment qui abrite l’hémicycle du Sanctuaire de Lourdes est le symbole de l’acte mémoriel et pénitentiel des Évêques de France.

[1Document qui autorise un prêtre catholique à dire la messe en tout lieu et confirme qu’il est exempt de toutes censures canoniques.

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